vendredi 25 juillet 2014

Happy birthday OSgrid, ou un laboratoire du futur... de la lecture aussi

A l'occasion de l'anniversaire d'OSgrid (grille test d'OpenSimulator, serveur open source d'hébergement d'univers web 3D immersive qui accueille certains de mes projets et prototypes réalisés par Jenny Bihouise) ces 26 et 27 juillet 2014, nous aurons le plaisir d'exposer et de présenter, notamment à nos amis américains et anglophones du Métavers, la modélisation opérationnelle d'une Roue à livres du 16e siècle.
C'est notamment ainsi que la prospective du livre et de la lecture anticipe la révolution prochaine de la médiation documentaire numérique en explorant aussi les laboratoires du futur web... 

 

vendredi 4 juillet 2014

Sur Ecriture et Plasticité de Pensée par Marc-Williams Debono

J'ai rencontré pour la première fois Marc-Williams Debono récemment à l'Ecole nationale des Chartes à l'occasion de la séance de clôture d'un séminaire auquel nous participions tous deux.
C'est dans ces circonstances que j'ai découvert l'existence de son essai de 2013 : Ecriture et Plasticité de Pensée, paru aux éditions multiformats et multilingues Anima Viva.

Cette phrase, qui arrive en fait bien tardivement dans le livre pourrait cependant peut-être servir à l'introduire : "Après s'être vu pour la première fois dans le reflet de l'eau, après s'être représenté dans les grottes de Lascaux, l'homme avait un besoin intense de communiquer son être. L'écriture naquit ainsi non pas tant comme un palliatif de l'icône, mais comme une activité rédemptrice."
La thèse, si nous l'acceptons docilement pour sa seule beauté plastique, est hautement séduisante, tout comme l'idée fixe de l'auteur : cette plasticité, qui sous ses déclinaisons multiples de plastir et autres, semblerait presque s'apparenter, ou tout au moins s'appareiller, à une loi universelle qui régirait toutes les choses dans leur ensemble et chaque chose dans son détail.

Ecrire pour s'inscrire dans l'histoire que, ce faisant très précisément, nous inventerions de ce seul fait, cette réflexion y participe à sa manière. 
Du peu sans doute que je suis parvenu à saisir de la lecture de cet ambitieux ouvrage, il me semble que c'est d'abord en poète, notamment naguère édité à feues les éditions du Soleil Natal de Michel Héroult, que c'est d'abord en poète donc que Marc-Williams Debono a ici amplement et naturellement contribué à accroître ce qu'il désigne lui-même un moment comme : "un amas galactique de proses".
Ce descendant de Mallarmé, qui ne semble pas insensible à Artaud et qui ne se préoccupe apparemment guère d'être compris, qui semble raisonner et résonner simplement pour charmer ceux qui seront sensibles à la musique de ses idées, celui-là n'est pas dépourvu d'un aspect don quichottesque.  Comme les navigateurs du 16e siècle il part à la découverte, il aborde aussi les espaces numériques et même le métavers que beaucoup aujourd'hui encore ignorent avec un aveuglement tellement têtu qu'il en est émouvant.
"De fait, écrit M.-W. Debono, les rebords du monde - la page - sont si extrapolés, les caractères devenus si fuyants, le blanc incantatoire - support inhibant ou aire de lancée de l'oeuvre - devenu si dynamique que je ne cherche plus l'émergence d'un sens mais que le sens émerge de cette multiplicité d'abords."
Peut-être est-ce la poésie qui sauve (apparemment ? vraiment ?) Marc-Williams Debono de la cruauté de certains universitaires.
Peut-être ce flot de mots (ou cette fontaine d'idées ?) humanise-t-elle en courbes les reflets tranchants d'une intelligence qui se donne à voir.
Peut-être le lecteur, ici, "invagine [ses] propres pensées pour se laisser bercer par l'élaboration d'une architecture singulière" ?
Mais, comme simple lecteur, j'avoue m'être égaré dans cette architecture. Qui sait, qui pourrait dire, qui pourrait affirmer avec certitude, qu'une part de moi-même n'en demeure pas maintenant prisonnière, y errant comme dans un labyrinthe, une forme très... plastique, et quelque part vivante et se jouant de mes lectures, de mes interprétations erronées, se jouant de moi ; et ce d'autant plus que j'ai commis l'erreur, peut-être le crime finalement, de ne pas lire cet essai dans un livre imprimé, un livre que j'aurais pu refermer après lecture, que je pourrais maintenant voir rangé paisiblement sur un rayon de ma bibliothèque comme un objet normal du monde extérieur, un objet qui n'existerait que par l'usage que j'en ferais à des moments donnés que je serais seul à décider ; au lieu de quoi je me retrouve seul et désorienté face à l'absence du livre lu, de ce livre-là, qui m'interroge toujours et qui peut-être renferme la scène du crime, celle où je tombe d'épuisement et où je crève seul comme un chien au milieu de l'agora, ou de la bibliothèque.
(C'est la première fois que je réalise ce que la lecture sur ce qu'ils appellent une "liseuse" peut avoir de dangereux, par ce qu'elle implique en termes d'impossibilité de projeter sur, et symboliquement de maintenir renfermées dans, un objet matériel bien délimité, la charge, la puissance contenues dans un livre. Cela est assez inquiétant.)