vendredi 19 mai 2017

Que transmettons-nous quand nous lisons à haute voix ?

Pourquoi spontanément disons-nous : "lire à haute voix", et, "lire à voix basse" ?
Ce positionnement des termes dit-il lui aussi quelque chose ?
Qu'est-ce qui se joue, au niveau de la lecture, entre la voix et l'écrit depuis, à la fois, notre maitrise du langage articulé, puis, quelques millénaires plus tard, celle de l'écriture ?
En quoi et comment notre corps physique, les vibrations qu'il émet et celles qu'il reçoit, entre-t-il en jeu ?
Pourrions-nous comparer la tension porteuse entre texte et voix, avec celle entre texte et image ?
Tant de questions qui couraient en filigrane à l'occasion de la conférence d'ouverture du Festival du Livre Audio à Strasbourg, que j'ai eu le plaisir de donner le 16 mai dernier au Centre de Culture Numérique de l'Université de Strasbourg et à l'invitation de La Plume de Paon.

Passer de la parole à l'écriture c'est faire un saut de l'invisible au visible. 
Notre espèce l'a fait. Elle est dans ce saut. 
La plupart du temps nous n'en avons pas conscience. 
Quelle portée a alors le fait d'écouter lire, ou de lire à voix basse, ou à haute voix ? Et le fait d'enregistrer des textes écrits ?
Par hasard, mais le hasard existe-t-il, je lisais la veille de mon intervention ceci : "Mais le Nommo, lorsqu’il parle, émet comme tout être une buée tiède porteuse de verbe, verbe elle-même. Et cette buée sonore, comme toute eau, se meut sur une ligne hélicoïdale..." (extrait de l'ouvrage de 1948, Dieu d'Eau, de l'ethnologue Marcel Griaule, en pays Dogon). Je trouve à la fois très belle et très intéressante cette idée de "buée sonore". 
  

De l'Antiquité au Cyberespace 

  
De l'Antiquité, évidemment nous avons rappelé l'étonnement de Saint Augustin lorsqu'il découvrit pour la première fois son Maître lisant sans proférer aucun son : « Quand il lisait, ses yeux couraient les pages dont son esprit perçait le sens ; sa voix et sa langue se reposaient. Souvent en franchissant le seuil de sa porte, dont l’accès n’était jamais défendu, où l’on entrait sans être annoncé, je le trouvais lisant tout bas et jamais autrement. » (Les Confessions de saint Augustin, extrait Livre VI, chapitre III), et j'ai trouvé intéressant de mettre en parallèle une peinture de Benozzo Gozzoli : "Saint Augustin entend le "Tolle, lege.« Prends et lis ! ».
Le "saisis", "attrape", le livre, le texte. Prends et lis !
Puis, pour le cyberespace, j'ai présenté le concept LIRE EN CHOEUR d'Adret Web Art que j'accompagne dans ses projets, notamment sur la plate-forme web 3D immersive avec avatars, EVER (acronyme de : Environnement Virtuel pour l'Enseignement et la Recherche) de l'Université de Strasbourg justement. 
La photo ci-dessus illustre cette présentation et vous pouvez accéder à la page web que je commentais en suivant ce lien : http://www.theatre-adret.fr/emission-lire-en-choeur.php, vous y aurez toutes les explications pour découvrir cette formule innovante d'émission de (web) radio invitant les auditeurs, non seulement à l'écoute, mais aussi à la lecture à haute voix.


N.B. : Les photos sont de Cécile Zanetta, merci à elle.

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